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La jeune fille au henné
C’était la fête des mères, Nadi Chaabi fêtait les femmes devant l’église Antoine Chevrier.
Elle décorait les mains des femmes avec du henné, d’un trait rapide et précis. Concentrée sur son œuvre, elle ne perdait cependant rien de ce qui l’entourait et elle a apprécié qu’on s’intéressât à ses talents. La beauté de cette jeune fille avait de quoi fasciner mais aussi sa simplicité de communication, son attention aux autres, elle rayonnait sans ostentation, présence tranquille, sereine et paisible.
Sa robe portait une grosse rose rouge, très gaie, mais je n’ai retenu que ce voile noir qui enveloppait ce visage de jeune fille, un écrin et non un écran. Le hijab est sensé « dérober au regard, cacher ». Ici au contraire, une aubaine pour le photographe, il offrait un cadre naturel et parfait éliminant le contexte et focalisant le regard sur le visage. Et pourtant que de retenue et de pudeur sur ce visage ; le voile est dans l’attitude toute de mesure, dans le maintien guidé par le respect, dans l’attention à l’autre éclairée par la déférence.
J’ai pensé au portrait de jeune fille au hennin de Pétrus Christus. Il y a cette même grâce sur le visage. Le costume, les bijoux, le hénin y sont des ornements qui rendent grâce à la beauté du modèle à la peau diaphane. Rien de tout cela ici bien sûr et ce n’est pas nécessaire, le voile noir en dit assez ; le reste affirme : « ma beauté est aussi intérieure ». J’ai aimé que ce voile soit la porte entrouverte d’un jardin secret.