• Mise en bière, autoportrait

    Mise en bière, autoportrait

     

    Une bière au milieu de tant de bouchons,« ça jure un peu » !  Qu’entends-je Jean-Michel?
    C’est un autoportrait, je suis né dans la bière et j’y retournerai évidemment.
    Je fus tout gamin en retraite à Chimay, les trappistes m’ont fait découvrir la musique qui élève au silence vers le divin mais aussi les accords harmonieux de la bière, du fromage et du poivre. La première fois que j’ai bu une Chimay, j’y étais allé à vélo, au retour, la route s’était agrémentée de vertus ondulatoires. Il faut dire que la Chimay bleue, grande réserve est à 9° ; ni filtrée, ni pasteurisée, elle a cette douce sauvagerie qui vous invite à l’abandon et à la soumission. Il faut accepter la défaite comme on accepte la séduction ; elle vous envahit, elle vous pénètre, mais c’est la condition indispensable pour parvenir à ces sensations de plénitude, de satiété, de liberté intérieure ; c’est un chemin vers le ciel mais sans escarpement. Pour une montée encore plus rapide, je préconise le mariage avec le cigare, mais là c’est une sécularisation, plus question de chant liturgique encore moins de chant homophone, il faut les voix endeuillées de passion morbide, de rêves insensées, de conquêtes impossibles, je recommande Schubert, il a cette folle gravité des amoureux insatisfaits.
    Quand on a apprécié une Chimay on est mûr pour le vin. Mais la Chimay est unique et le vin multiple, chaque bouteille vous appelle à l’inconstance ; La Chimay, elle, vous est fidèle.

     

    La fête à Bacchus (MKD)

    Il s’agit bien d’une célébration spirituelle, assouvir le corps pour élever l’esprit. Ou bien il s’agit d’une merveilleuse tromperie : on fait croire qu’on élève l’esprit alors qu’on exalte le corps. Le verre de Chimay ressemble à un calice. Ces bons moines auraient-ils trouvé le moyen de faire croire frauduleusement que le vin–sang du Christ était en fait de la bière. Ah ! Et qu’en boire nous fait participer au sacrifice rédempteur… Oh ! 

     

     "Au printemps, je vais quelquefois m'asseoir à la lisière d'un champ fleuri.
    Lorsqu'une belle jeune fille m'apporte une coupe de vin, je ne pense guère à mon salut" 

    Rubayat de Omar Khayam 

     

    "Ainsi donc, tu as biberonné à la Chimay. On s'explique mieux les dérives qui s'ensuivirent. Serais-tu allé jusqu'à entrecouper tes fêtes vinique en buvant de cette eau du Sibaris qui vous fait des cheveux bouclés? Ca ne s'invente pas, ça, les sybarites qui buvaient de l'eau d'une des deux rivières qui ceignaient leur cité voyaient aussitôt leurs cheveux se boucler. C'est Wiktionnaire qui le dit, alors c'est forcément digne de foi.
    Dire que je ne connaissais même pas la Chimay, moi qui n'ai jamais juré que par la Fischer, au nom de l'adage "Drink Fischer Bier, dànn steht er dir"! Je goûterai la Chimay dès ce soir. "  Raymond

     

    La Fischer ! ah ! la dernière que j'ai achetée "Réserve, ambrée, Grande bière d'Alsace", j'ai craché la première gorgée et jeté le reste dans l'évier. J'ai gardé la bouteille pour ne pas oublier de ne plus en acheter. Encore pire que du thé trop sucré, ils ont dû la créer en pensant que ça ravirait les Anglais. Ils auraient au moins pu avertir que c'était une bière pour les étrangers, ou pour ceux qui veulent se saouler ou plutôt se noyer car il faut en boire une rivière pour y trouver un peu d'émotion. La Chimay ne te saoule pas elle t'enivre. Tu oublies de dire que l'eau du Sibaris rendait noirs les animaux qui en buvaient, belle image pour montrer du doigt ceux qui boivent sans déguster, remplissent leur panse sans élever leur esprit, se pintent la gueule au lieu de siffler un verre, se pètent la ruche sans récolter le miel, s'en mettent plein la lampe sans jamais être brillants,chargent la mule sans voir qu'elle est de mauvais poil,se paquette la fraise sans y mettre un peu de crème, s'en collent gros dans le fusil croyant devenir un bon coup, leur bouche est un cornet et leur ventre une barrique, jamais ils ne se planteront le nez au ciel, ils ne se moucheront dans les étoiles et surtout jamais ils ne pisseront comme je pleure (sur les femmes infidèles évidemment, merci Jacques).

    En fait tu me fais découvrir, Raymond, que je suis un ascète sybarite (va comprendre !)

     

    "Un dicton d'origine germanique prétend qu'il faut toujours boire la bière avant le vin: "Wein nach Bier, das rat Ich dir, Bier nach Wein, das lass sein!" (orthographe non vérifiée). Par ailleurs, je me demande pourquoi, justement, la notion de plaisir est associée à des drogues, quelles qu'elles soient. Ainsi donc l'être humain ne serait capable de jouissance sans cette béquille? Si c'est le cas, c'est qu'il est mal fait! Les moments d'extase que produisent ces drogues rappellent notre nature mortelle. Comment traduire tout cela en images? C'est pourquoi ces deux capsules (verte et bleue) me sont très sympathiques parce qu'elles refusent l'uniformité. C'est le mai 68 du bouchon."   Jean-Michel